Chagrin d'école de Daniel Pennac
En
France, l’année scolaire commence au mois de septembre après de longues
vacances estivales et se termine en juin. Certains enfants aiment l’école,
d’autres sont tristes d’y retourner. On dit qu’ils ont du chagrin. C’est cette
expression que Daniel Pennac a choisi pour titre de son roman
autobiographique : Chagrin d’école,
pour lequel il a obtenu le prix Renaudot en 2007. L’objectif de l’auteur est
d’exposer dans ce livre « la douleur partagée du cancre ( le mauvais élève
), des parents et des professeurs. »
Le roman commence par une scène touchante où l'écrivain évoque sa mère devenue presque centenaire et qui ne comprend pas que son petit est devenu un écrivain célèbre.
Commençons
par l’épilogue : Maman, quasi centenaire, regardant un film sur un auteur
qu’elle connaît bien. On voit l’auteur chez lui, à Paris, entouré de ses
livres, dans sa bibliothèque qui est aussi son bureau. La fenêtre ouvre sur une
cour d’école. Raffut de récré. On apprend que pendant un quart de siècle
l’auteur exerça le métier de professeur et que s’il a choisi cet appartement
donnant sur deux cours de récréation, c’est à la façon d’un cheminot qui prendrait
sa retraite au-dessus d’une gare de triage. Puis on voit l’auteur en Espagne,
en Italie, discutant avec ses traducteurs, blaguant avec ses amis vénitiens, et
sur le plateau du Vercors, marchant, solitaire, dans la brume des altitudes,
parlant métier, langue, style, structure romanesque, personnages…Nouveau bureau,
ouvert sur la splendeur alpine, cette fois. Ces scènes sont ponctuées par des
interviews d’artistes que l’auteur admire, et qui parlent eux-mêmes de leur
propre travail : le cinéaste et romancier Dai Sijie, le dessinateur Sempé,
le chanteur Thomas Fersen, le peintre Jürg Kreienbühl.
Retour
à Paris : l’auteur derrière son ordinateur, parmi ses dictionnaires cette
fois. Il en a la passion, dit-il. On apprend d’ailleurs, et c’est la conclusion
du film, qu’il y est entré, dans le dictionnaire, le Robert, à la lettre P,
sous le nom de Pennac, de son nom entier Pennacchioni, Daniel de son prénom.
Maman,
donc, regarde ce film, en compagnie de mon frère Bernard, qui l’a enregistré
pour elle. Elle le regarde d’un bout à l’autre, immobile dans son fauteuil,
l’œil fixe, sans piper mot, dans le soir qui tombe.
Fin
du film.
Générique.
Silence.
Puis,
se tournant lentement vers Bernard, elle demande :
Tu crois qu’il s’en sortira un jour ?
Personne ne comprenait pourquoi Daniel était moins doué que ses frères.
Bien
entendu se pose la question de la cause originelle. D’où venait ma
cancrerie ? Enfant de bourgeoisie d’Etat, issu d’une famille aimante, sans
conflit, entouré d’adultes responsables, qui m’aidaient à faire mes devoirs…
Père polytechnicien, mère au foyer, pas de divorce, pas d’alcooliques, pas de
caractériels, pas de tares héréditaires, trois frères bacheliers ( des matheux,
bientôt deux ingénieurs et un officier ), rythme familial régulier, nourriture
saine, bibliothèque à la maison, culture ambiante conforme au milieu et à
l’époque ( père et mère nés avant 1914 ) : peinture jusqu’aux
impressionnistes, poésie jusqu’à Mallarmé, musique jusqu’à Debussy, romans
russes, l’inévitable période Teilhard de Chardin, Joyce et Cioran pour toute
audace… Propos de table calmes, rieurs, cultivés.
Et
pourtant, un cancre.
(…)
Un
cancre sans fondement historique, sans raison sociologique, sans
désamour : un cancre en soi. Un cancre étalon. Une unité de mesure.
Ses mauvais résultats
scolaires n’ont pourtant pas empêché Daniel Pennac de devenir professeur de
français puis écrivain à succès, mais il explique à quel point son expérience négative
de l’école a marqué à vie sa personnalité et la façon d’exercer son métier.
En
lisant ce livre vous découvrirez pourquoi « le savoir est d’abord
charnel », vous comprendrez qu’un mauvais élève « c’est comme un
oignon qui entre en classe », et
vous partagerez avec Daniel Pennac le plaisir de la lecture qu’il aime tant et qui l'a sauvé, dit-il.
Bonne lecture !
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