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J'ai conçu ce blog comme un mille feuille de mes passions, à la fois musée et bibliothèque virtuels et vivants, que j'ai eu le plaisir de partager avec le public japonais lors de mes interventions à l'Institut Français du Japon à Tokyo pendant 5 ans.
Mon objectif ? Vous communiquer le désir et le plaisir d'apprendre et d'échanger ...au-delà des frontières.

Dear all,
Welcome on my Bloc Nat, a special space for shared discoveries.
I created this blog as a "mille feuille" of my passions, both virtual museum and library during my work at French Institute In Japan, Tokyo, during 5 years. My goal is to inform you of desire and love of learning... beyond borders. Enjoy with me !

Avril 2019 : changement de cap !
Je mets dorénavant toute mon énergie bénévole au service de l'Association Du Mont Brouilly au mont Fuji. Retrouvez mes conseils de lecture sur le site internet de l'association : www.brouilly-fuji.com

April 2019 : I change !
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See you !

dimanche 14 février 2016

J'ai lu pour vous ... Chérie, je vais à Charlie de Maryse Wolinski

Chérie, Je vais à Charlie
Maryse Wolinski

Le 7 janvier 2015, le journal satirique français Charlie Hebdo a fait l'objet d'un terrible attentat qui a causé la mort de 12 journalistes et dessinateurs de renom.
Parmi eux, GEORGES WOLINSKI, à qui sa femme, Maryse, elle-même journaliste et écrivain, a voulu rendre hommage au nom de leur amour infini, de leur amour fracassé.
C'est avec beaucoup d'émotion que j'ai lu ce livre et je dédie cette lecture à mon amie Nathalie, qui vient de perdre son mari, et à qui j'ai beaucoup pensé en parcourant ces pages pleines de douleur mais aussi d'amour.





J'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce livre, même si l'ouvrage n'a rien de stylistiquement recherché. C'est plutôt un livre "à chaud" écrit avec le coeur, sous le coup de la peine et de l'incompréhension. C'est une sorte d'enquête sur cette journée du 7 janvier, mais c'est surtout un très beau focus sur une très profonde histoire d'amour.

" Quarante - sept ans que cet homme, fou de femmes, de leur silhouette, de leurs audaces, de leur voix, de leurs modes, de leur courage, de leur foi en ce qu'elles décident, de leur force d'âme, pose son regard amoureux sur moi. Un regard qui transperce et bouleverse. Un regard qui donne de l'élan, de la confiance, de l'envie de vivre, de l'envie d'aimer."

" C'est la première conférence de rédaction de l'année. Georges m'a informée que Charb, le rédacteur en chef, a demandé que l'ensemble des collaborateurs soient présents. Ils doivent partager une galette des rois, l'occasion sans doute de parler de l'état catastrophique des finances du journal et de son avenir plus qu'incertain."

Le livre débute par l'évocation de ce matin du 7 janvier, matin ordinaire que l'horreur de l'attentat a transformé en jour historique. Evocation d'un quotidien qui paraît toujours dérisoire face à la Mort...

" Chérie, je vais à Charlie ! dit-il quelques minutes plus tard en élevant la voix, du fond de l'appartement. Puis il revient sur ses pas, écarte le rideau qui sépare ma chambre de la salle de bains, passe la tête. Chérie, je vais à Charlie. Il doit être 9 heures, je suis en retard, enroulée dans ma serviette de bain, je lui accorde peu d'attention. Je me fais la réflexion qu'il part plus tôt que d'habitude quand il se rend à la conférence de Charlie. J'écoute ses pas dans le couloir, puis la porte claque. A ce moment-là, j'éprouve toujours un brin de tristesse. Mais aujourd'hui, je sais que nous allons nous retrouver à 16 heures."

Le livre se poursuit par le récit de la journée de Maryse et la reconstitution minutieuse de l'attentat, grâce à un travail approfondi de journaliste enquêtrice. Récits, témoignages, recoupements d'infos... derrière la femme blessée par le deuil se cache la femme en colère, la journaliste qui veut à tout prix comprendre ce qui s'est passé, et notamment pourquoi personne n'est intervenu entre la première alerte donnée et la fusillade. Elle mentionne à plusieurs reprises les onze appels parvenus au 17 sans qu'aucune intervention de police ne soit lancée entre 11H18 et 11H35.

" Les plumes impertinentes du dessin de presse ont servi de cible aux fondamentalistes religieux. On a tenté de tuer le rire, ce contre-pouvoir. Mais comme l'a écrit ma fille, Elsa, dans une lettre à son père publiée dans le journal Elle, Ils ont tué l'homme, mais pas ses idées."

Colère aussi d'avoir été tenue complètement à l'écart des premières constatations, des premières informations sur la mort de Georges. Elle apprend l'attentat dans un taxi parisien et reste de longues heures sans savoir si son mari est mort ou vivant.

" J'ai la sensation que mon corps ne m'appartient plus. Je veux voir mon mari. Le chauffeur hésite et me déconseille de m'y rendre. J'insiste, je veux absolument voir mon mari, je veux être auprès de lui. La pression monte, une étrange chaleur m'envahit. Mes idées se brouillent. Je n'y vois plus clair. A ce moment-là, mon téléphone sonne. Arnauld, mon gendre, se trouve sur les lieux de l'attentat, au 10 rue Nicolas-Appert. Les bureaux de sa société étant proches, alerté via les réseaux sociaux, il s'est précipité à Charlie Hebdo. Alors ? Où est Georges ? Je veux être avec lui. Je ne laisse pas parler Arnauld et il finit par m'interrompre. Il est d'accord avec le chauffeur de taxi, je dois rentrer à mon domicile et y attendre les nouvelles. Pour l'heure, on ne sait rien."

S'en suivent de longues heures d'attente ... La peur s'étend... les questions fusent...

" Impossible de m'asseoir. Je vais de mon bureau à mon lit, du canapé à la chaise, je me dis à nouveau qu'il ne peut rien arriver à Georges, que ce n'est pas possible. Mes pensées s'entrechoquent et, très vite, mon corps prend le relais. J'ai le sentiment qu'il se vide, comme si tous mes organes se dissociaient et que mon cerveau ne fonctionnait plus. Je tremble de froid et, en même temps, une bouffée de chaleur enflamme mon visage. (...) Je vacille et la vie bascule. Ma vie bascule. Notre vie s'en va."

C'est finalement Arnauld, son gendre, qui lui apprendra la mort de Georges par téléphone.

" Chérie, je vais à Charlie. Cela faisait seulement quelques heures qu'il m'avait quittée. Impossible de croire à son assassinat. Pourquoi lui ? Autour de moi, certains pleuraient. Moi, je n'avais pas de larmes. Ainsi notre vie s'en est allée."

J'ai trouvé particulièrement émouvant le moment où l'on rend à Maryse les objets personnels de Georges, 3 jours après l'attentat : son agenda, sa sacoche, sa montre ...
" J'ai serré dans mes mains ces objets comme des trésors retrouvés."

" Puis le commandant a ouvert un tiroir et en a tiré quelque chose que je n'ai pas aperçu tout de suite. Il est passé de l'autre côté de la table sur laquelle s'amoncelaient des dossiers, s'est approché de moi et m'a tendu l'alliance de Georges. Mes larmes contenues depuis quelques instants, je n'ai pas pu les retenir. cette alliance, il ne l'avait jamais quittée depuis le 3 juillet 1971, jour de notre mariage à Canapville, ce village de Normandie où nous avions réquisitionné deux témoins. (...) Georges aimait à me rappeler qu'il n'avait jamais enlevé son alliance et qu'il en était fier, moi qui en avais déjà perdu deux, ne supportant aucun bijou aux doigts pour travailler. Une alliance, ce n'est pas un bijou. Je l'entends prononcer ces mots de tendre reproche."

La colère toujours et encore... contre les failles de la sécurité de Charlie Hebdo.

" Oui, il y a eu des failles dans la sécurité de Charlie Hebdo, et elles sont nombreuses. Parce que, contrairement au service des sites sensibles de la préfecture, l'Etat, les autorités policières et les responsables du journal refusaient l'idée que nous étions déjà en guerre. Une guerre de l'ignorance contre la culture? De la liberté tant chérie par Georges contre l'obscurantisme."

Mais c'est sur des mots d'amour que se clôt le livre. L'amour d'une femme qui décide de dédier le bureau de son artiste de mari au Centre International de la caricature, du dessin de presse et d'humour à Saint-Just-Le-Martel.



" Parfois, quand les journées sont trop rudes, j'ai envie de lui crier que la vie, sans lui, est un enfer, que je ne m'en sortirai pas, que mon avenir est un désert (...) Mais pour lui, désormais, je veux être celle qui va."

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